Enterrement prématuré
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I Enterrement prématuré

J’ouvre les yeux. Ma vue ne s’étant pas encore adaptée je ne peux pas dire où je suis. La seule chose que je sais, c’est que j’ai un mal de crâne titanesque. Je sens une paroi en bois sur ma gauche et passe ma main dessus quand, à peine plus haut, je sens comme un mur perpendiculaire à elle, au-dessus de moi. Je comprends pas. Ma main droite rencontre elle aussi une paroi parallèle à la première. Six planches en bois, deux sur les côtés, une en dessous et une au-dessus, et je suppose une vers ma tête, une vers mes pieds.

Il me faut pas bien longtemps pour comprendre et avoir peur. Je suis piégé dans un cercueil.

D’accord, tout va bien se passer. J’en suis sûr. Il faut que je reste calme et que je trouve une solution. Mon instinct me dit que frapper sur le cercueil et hurler à plein poumons ne ferait que me faire gaspiller de l’énergie, donc on va éviter. Bien. Peut-être que je peux essayer d’écouter autour voir si j’arrive à entendre quelqu’un marcher en haut.



D’accord, soit j’entends pas, soit y’a personne. Génial.
Dire que je vais crever à cause du truc dans lequel on est censé te mettre après ta mort. C’est tellement ironique, au moins je suis au bon endroit pour mourir. Eh, j’arrive quand même à être cynique dans une situation pareille. D’ailleurs, j’étais cynique avant ? Qui je suis en fait ? Et comment je suis arrivé là ? ET POURQUOI JE ME POSE CES QUESTIONS QUE MAINTENANT ?

Ok, on va rester calme. Aller, caaaaaaaalme.

Procédons par étape. Je n’arrive pas à me souvenir de quoi que ce soit avant que je sois enfermé ici. Je suis donc totalement amnésique. Totalement ? Non. Je me rends compte que je me souviens de certaines choses, mais pas des souvenirs, juste des informations qui me reviennent en tête. Je sais par exemple que l’on est en 2017, que l’actuel président des Etats-Unis est, oh mon dieu, Donald Trump, qu’il faut manger cinq fruits et légumes par jour, et que l’espérance de vie de quelqu’un dans un cercueil est d’environ cinq heures et demie. Est-ce que ces informations sont utiles ? Non.

Je sais pas non plus depuis combien de temps je suis là, et bien entendu, je suppose que je n’ai pas mon portable sur toc

Qu’est-ce que…
toc toc

J’ai tapé mon bras contre la paroi du cercueil, et ça sonne creux.
Comme s’il n’y avait rien derrière.

D’accord, imaginons que je ne sois pas sous terre. Mais dans une chambre funéraire.
Le cercueil est donc sur une espèce de table. Si j’arrive à faire basculer le cercueil par terre, j’ai peut-être une chance qu’il se casse et s’ouvre. J’aurais plus qu’à sortir.

Bien, plus qu’à essayer de bouger ce cercueil de merde.
Je vais essayer de me projeter contre le côté droit du cercueil, on va voir si mon hypothèse est la bonne.

Je l’ai senti bouger. Pas énormément, mais il a déjà bougé un peu.
Je vais réessayer.
Encore.
Il a suffisamment bougé pour que je le fasse basculer, si je me mets là. C’est le moment de vérité.


Aïe.

Je crois qu’en tombant, je me suis fracassé le crane contre la paroi et que j’ai perdu connaissance quelques minutes. Ma tête me fait extrêmement mal. Je crois que j’ai réussi. Il a l’air vraiment fissuré. En forçant un peu je vais peut-être pouvoirCRACK
C’est bon, il est ouvert. Je vais pouvoir sortir.

En m’extirpant du cercueil, je me relève et observe l’environnement qui m’entoure. Le cercueil, d’un bois peint en noir est fracturé sur le sol, la présence d'une serrure à l’extérieur m'étonne.
Derrière lui, une sorte d’autel sur lequel est resté, comme un linceul rouge et violet. Le cercueil devait être posé dessus. Je retrouve ce tissu de partout dans la chambre, sur tous les murs. Rouge et violet, mais aussi orné de deux lettres écrites en fil d’or.
WW

J’ignore ce que cela peut bien signifier. Peut-être mon nom ?

Continuant l’exploration de la pièce, je remarque que la seule source de lumière consiste en des bougies qui, vu leur taille impressionnante, peuvent bien être là depuis des jours. Au pied de l’autel, et tout le long des murs, je remarque des fleurs. Les gens devaient soit énormément m’apprécier, soit je vivais dans un milieu suffisamment fortuné pour m’offrir tout ça lors de ma mort.
Derrière moi, je remarque la présence d’une porte, rouge écarlate. Les murs étant en pierre, et ne laissant passer aucun courant d’air, je suppose qu’ils doivent être assez épais, celle-ci reste donc ma meilleure chance. Prenant une bougie avec moi, je m’approche de la porte et essaye de l’ouvrir. Sans succès. Elle est verrouillée.

Elle m’a l’air assez épaisse, mais je vais essayer de l’ouvrir. Je pose la bougie par terre et essaye de me projeter contre. Une fois. Deux fois. Trois fois. La quatrième, la bougie tombe sur les fleurs. Mélange de vraies et de fausses fleurs, et les tissus longeant les murs à proximité, le tout prend feu très rapidement. Je me retrouve bloqué dans une chambre funéraire, une porte presque blindée bloquant mon chemin, avec un incendie à gérer. Qui dit aucun courant d’air, dit asphyxie très rapide. Je vais devoir agir vite.

Je me dirige vers le cercueil et le tire pour qu’il soit couché droit entre l’autel et la porte. J’essaye de le soulever. Il est excessivement lourd et je peine rien qu’à le décoller du sol.
L’incendie est de plus en plus violent. La chaleur m’agresse. Ma respiration se fait de plus en plus difficile. Il ne me reste plus beaucoup de temps.
L’adrénaline faisant son effet, je réussis tant bien que mal à soulever le cercueil. Je le place debout face à moi. Je monte sur l’autel, et saute sur le haut du cercueil, priant pour que l’ajout des deux poids tombant contre la porte suffise à la défoncer. Nous basculons.

Le bois percute violemment la porte, ma tête se cogne contre lui, et les gonds de la porte sautent. Je me sens basculer à nouveau. Et lorsque j’atterris sur le sol, le cercueil se fracasse et se désintègre. Les morceaux de bois volent et je ressens une vive douleur dans mon flanc droit.

Entendant le feu qui crépite très proche de moi, je m’extirpe tant bien que mal de mon tombeau, titubant et sonné. Je me retourne et voit le caveau en pierre brûler de l’intérieur comme une porte de l’enfer. Déboussolé, je lève la tête et voit une inscription gravée dans la pierre.
« Williaw Weaver »

Voilà donc mon nom. La douleur dans mon flanc me relance. Je baisse le regard et remarque un morceau de bois de plusieurs centimètres plantés à l’intérieur. Je le retire, et il n’y a que quelques mots qui me viennent à l’esprit au milieu de ce cimetière.

« Bordel de merde. »

Je m’effondre alors, plongeant dans l’inconscience.

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