Colocataires
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VI Colocataires

"Comment ?"
"Elle s'appelait Irène."

La petite Clover essayait de calmer ses larmes ; William, lui, tentait tant bien que mal de cacher sa surprise.
Il ne savait plus quoi dire. Il savait enfin qui était cette "amie" qu'Irène allait voir si souvent. Les idées et les hypothèses chamboulaient à nouveau dans sa tête. Son premier objectif était maintenant de surveiller ces enfants pour en apprendre plus sur eux, et pour cela, il allait devoir vivre avec eux dans la petite cabane… et il allait devoir bien s'entendre avec Charles.

Une question, il devait en poser, en apprendre plus sur Charles. William détestait être pressé, mais il devait profiter de la récence des événements, tant que tout le monde l'apprenait, tant que les gens étaient encore sous le choc de la mort de la philanthrope qui possédait l'entreprise Weaver. Il n'avait pourtant aucune raison d'enquêter à ce moment précis, mais pour lui, ça pouvait toujours servir. S'il devait convaincre quelqu'un, ses mots auraient plus d'impact. Ils en auraient moins lorsque tout le monde aura oublié.

Sans perdre une seconde de plus, il demanda à la fillette qui venait tout juste de se remettre de ses émotions :
— Il n'y avait que ces deux femmes ?
— Euh… et bien, pour nous, oui. Mais je sais que Charles a appris avec sa mère.
— Sa mère ? Il a une famille, donc ? Pourquoi vit-il avec vous ?
— Non, il n'en a plus… sa mère a été tuée quand il avait dix ans, et son père l'a abandonné… Il dit toujours que plus tard, il sera détective.
— Alors c'est pour ça qu'il lit des romans policier ! Il rêve de son futur métier, c'est ça ?
— Ne te moque pas de lui ! Charles est très gentil… Il veut juste nous protéger, il ne voulait pas être méchant avec toi…
— C'est décidé.
— Quoi ?
— Je vais vivre avec vous.
— Mais… et Charles ?
— Ne t'en fais pas, je m'occupe de tout. Allez rentrons, il fait froid.

Une fois rentrés, William expliqua au groupe qu'il vivrait désormais avec eux. Les quatre petits semblaient ravis, Charles, lui, regardait toujours William d'un air méfiant.
William n'essaya pas de gagner la confiance de Charles, il voulait que celui-ci la lui accorde lui même.

Les mois passèrent, de plus en plus vite, William s'était dépêché pour rien : les gens avaient déjà oublié Irène. Son manoir avait été racheté par un noble peu après son décès. William, grâce au bouche à oreille, savait où allait se passer l'enterrement, et y assista de loin, pour voir une dernière fois son amie.

Une année et un mois passèrent, les enfants grandissaient tous, sauf William. Le petit Sebastian lui disait de ne pas s'inquiéter et qu'il grandirait sûrement plus tard.
Charles était devenu moins méfiant envers William, mais avait toujours des doutes.
Un matin, William était assis, adossé au mur face à la porte qui laissait passer les premiers rayons du soleil sous ses planches fissurées ou cassées. La lueur rendait la poussière visible ; elle flottait dans tous les sens, parfois à gauche, parfois à droite, parfois les deux, puis elle retombait par terre pour s'envoler à nouveau lorsqu'un petit courant d'air passait par la porte.
Cette simple vue rendait William triste, sans qu'il sache pourquoi.

Il songeait à abandonner cette enquête ridicule. Qu'est-ce qu'un gosse comme lui pouvait bien faire ? De toute façon, Irène était déjà enterrée depuis longtemps.
Plus aucune nouvelle de Phelps, plus aucune nouvelle des enfants disparus. Juste les jours qui passaient et qui se ressemblaient tous de plus en plus.
L'horrible quotidien. William voulait de l'aventure et de l'action, mais il n'avait pas bougé depuis un an.
Il n'avait plus aucune raison pour se motiver, tout était déjà loin. Il réfléchit à cela toute la journée.

La nuit commençait à tomber lorsque William sortit prendre l'air. Il vagabondait dans Londres tandis que les gens rentraient tous chez eux. Malgré cela, il restait encore quelques personnes dont un homme qui vendait le journal. Ayant quelques pièces en poche, William en acheta un, pensant que ce serait un bon moyen de passer le temps. Il s'arrêta net lorsqu'il vit le gros titre :

"John Adkins et Arthur Phelps rachètent l'entreprise Weaver".

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